AU SERVICE DU SULTAN - Contes pour Monique et Pierre - N° 143
AU SERVICE DU SULTAN
Reçu oralement
Le sultan, et tout le pays à sa suite, venait de découvrir les délices de l'aubergine.
Le souverain en était fou, au point qu'il exigeait d'en manger tous les jours, matin, midi et soir.
Il dégustait tri-quotidiennement, ravi, son légume favori tout en disant à Nasreddine, son bouffon fidèle :
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L'aubergine est la meilleure chose qui soit au monde !
Et Nasreddine s'inclinait et répondait :
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Oui, ô sultan, Splendeur sur ma tête, l'aubergine est la meilleure chose soit au monde !
Au bout d'un mois, le sultan se régalait un peu moins. Au bout de quarante jours, quand on lui apporta son repas à l'aubergine, le sultan s'écria :
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Encore des aubergines ! Toujours des aubergines ! J'en ai assez des aubergines ! Je hais les aubergines ! L'aubergine est la pire chose qui soit au monde !
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Oui, ô sultan, Splendeur sur ma tête, l'aubergine est la pire chose qui soit au monde ! dit Nasreddine en s'inclinant.
Le sultan regarda son bouffon l'oeil soupçonneux et gronda :
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Pendant quarante jours tu m'affirmais que l'aubergine était la meilleure chose soit au monde ! Et maintenant tu dis que l'aubergine est la pire chose soit au monde ! Tu te moques de moi ?!
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Ô sultan, splendeur sur ma tête, répondit Nasreddine, je n'oserais pas : je suis à ton service, ô sultan, Splendeur sur ma tête ! Pas à celui des aubergines !
Le sultan gavé d'aubergines ...
à moins que ce ne soit de pouvoir !