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Le blog d'Hélène Loup
24 janvier 2010

"Les trois boucs Brousses"

L E S   T R O I S   B O U C S   B R O U S S E S

                                                                                                  Conte traditionnel

  Il était une fois trois boucs brousses qui avaient passé le long hiver glacé à l’abri, dans leur étable, au fond de la vallée.

  Un petit tout petit bouc brousse avec une petite toute petite voix, de petits tous petits sabots et une petite toute petite clochette qui faisait : Diling ! Diling ! Diling !

  Un moyen bouc brousse avec une moyenne voix, de moyens sabots et une moyenne cloche qui faisait : Ding ! Dong !  Ding ! Dong !  Ding ! Dong !

  Et un grand gros énorme bouc brousse avec une grande grosse énorme voix, de grands gros énormes sabots et une grande grosse énorme cloche, comme ces cloches d’église qu’on appelle carillon, et qui faisait : Bong ! Bong ! Bong ! Bong !

  L’hiver finissait. Les trois boucs brousses n’avaient plus de foin, d’herbe sèche, plus rien à manger dans leur étable au fond de la vallée. Ils avaient faim. Or, par la fenêtre, ils ont vu que là-haut, sur la montagne, le printemps arrivait. La neige fondait et l’herbe verte et fraîche commençait à pousser. Pour la brouter, la manger, il suffisait d’aller dans la montagne.

  Seulement, pour aller dans la montagne, il fallait traverser un torrent encaissé, une rivière rapide et profonde. Heureusement, sur le torrent encaissé, sur la rivière rapide et profonde, il y avait un pont. Seulement, sous le pont, il y avait un troll, un monstre comme on en trouvait autrefois en Scandinavie, qui mangeait tous ceux qui passaient sur le pont.

  Les trois boucs brousses avaient faim. Ils se sont mis en route, chacun à son allure, chacun à sa vitesse.

  Le premier à arriver sur le pont, le plus rapide, parce que le plus léger, c’est le petit tout petit bouc brousse. Quand il passe sur le pont, ses petits tous petits sabots font :

                             Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac !

Et sa petite toute petite clochette fait :

                             Diling ! Diling ! Diling !

  Sous le pont, le troll demande :

  -  Qui ose trottiner sur mon pont ?

  Et de sa petite toute petite voix, le petit tout petit bouc brousse répond :

   -  C’est moi ! C’est le petit tout petit bouc brousse.

  Le troll monte sur le pont et dit :

  -  Petit tout petit bouc brousse, je vais te manger !

  Mais le petit tout petit bouc brousse répond de sa petite toute petite voix :

-    Mais non, ne me mange pas ! Vois comme je suis maigre à la fin de l’hiver. Un peu de poil sur un peu de peau. Tu ne

     me sentirais pas sur la langue. Laisse-moi aller engraisser dans la montagne. Tu me mangeras au retour. En attendant, tu 

     peux manger mon frère, le moyen bouc brousse, qui arrive derrière moi. Il est plus gros que moi.

  Le troll le tâte et dit :

-         C’est vrai que tu es bien maigre ! Un peu de poil sur un peu de peau. Je ne te sentirais pas sur la langue. Va engraisser dans la montagne. Et prends garde à être charnu et gras quand tu redescendras. En attendant, je mangerai ton frère.

  Le petit tout petit bouc brousse va dans la montagne où il se met à paître, à brouter, à manger l’herbe verte et fraîche.

  Le deuxième à arriver sur le pont, un peu moins rapide, parce qu’un peu moins léger, c’est le moyen bouc brousse. Quand il passe sur le pont, ses moyens sabots font :

                            Pan ! Pan ! Pan ! Pan!

Et sa moyenne clochette fait:

                                     Ding ! Dong !  Ding ! Dong !

  Sous le pont, le troll s’écrie :

  -    Qui ose marcher sur mon pont ?

  Et de sa moyenne voix, le moyen bouc brousse répond :

-         C’est moi ! C’est le moyen bouc brousse.

  Le troll monte sur le pont et dit :

-         Moyen bouc brousse, je vais te manger !

  Mais le moyen bouc brousse répond de sa moyenne voix :

-         Mais non, ne me mange pas ! Vois comme je suis maigre à la fin de l’hiver. Un peu de peau sur un peu d’os. Ca te ferait à peine une bouchée ; et mes os risqueraient de te rester en travers de la gorge. Laisse-moi aller engraisser dans la montagne. Tu me mangeras au retour. En attendant, tu peux manger mon frère, le grand gros énorme bouc brousse qui  arrive derrière moi. Il est plus gros que moi.

  Le troll le tâte et dit :

-         C’est vrai que tu es bien maigre. Un peu de peau sur un peu d’os. Tu me ferais à peine une bouchée. Et tes os risqueraient de me rester en travers de la gorge. Va engraisser dans la montagne. Et prends garde à être charnu, gras et dodu quand tu redescendras. En attendant, je mangerai ton frère.

  Le moyen bouc brousse rejoint son frère, le petit tout petit bouc brousse dans la montagne et, avec lui, il commence à paître, à brouter, à manger l’herbe verte et fraîche.

  Le troisième à arriver sur le pont, le plus lent, c’est le plus lourd, le grand gros énorme bouc brousse. Quand il passe sur le pont, ses grands gros énormes sabots font :

                                     Broum ! Broum ! Broum !

Et sa grande grosse énorme cloche, comme ces cloches d’église qu’on appelle carillon, fait :

                                     Bong ! Bong ! Bong !

  Sous le pont, le troll hurle:

-         Qui ose ébranler, faire trembler mon pont ? 

  Et de sa grande grosse énorme voix, le grand gros énorme bouc brousse répond :

-         C’est moi ! C’est le grand gros énorme bouc brousse.

  Le troll monte sur le pont et dit :

-         Grand gros énorme bouc brousse, je t’attendais. Je vais te manger.

  Mais de sa grande grosse énorme voix, le grand gros énorme bouc brousse répond :

-         Ah oui ? Essaye un peu !

  Et de ses grands gros énormes sabots, le grand gros énorme bouc brousse a pris un grand gros énorme galop ! De ses grandes grosses énormes cornes plantées sur sa grande grosse énorme tête il donne un grand gros énorme coup au troll qui en fait un grand gros énorme saut  par-dessus le soleil, la lune et les étoiles et retombe dans le torrent, la rivière rapide et profonde, qui l’emporte loin, très loin, jusqu’à la mer. On ne l’a plus jamais revu.

  Les trois boucs brousses ont passé le printemps et l’été sur la montagne, à brouter, paître, manger l’herbe verte et fraîche. Ils ne sont redescendus vers leur étable qu’à l’automne, quand la neige a commencé à tomber. Lorsqu’ils sont passés sur le pont, ils étaient gras, charnus, dodus, à point. Mais il n’y avait plus personne, sous le pont, pour les manger. Et il n’y aura plus jamais personne.

  Certains conteurs prétendent que les serpents de mer seraient des morceaux du troll. C’est ce que certains disent. Moi, je ne sais pas : je n’ai jamais vu de serpents de mer ! En revanche, je sais bien que tous les conteurs sont des menteurs.

                                                 Plus on en dit et plus on ment !

                                                 On n’est pas là pour dire réalité !

                                                 Tout au plus quelques vérités !

                                                 Mais pas réalité !

  Ce conte est d’origine scandinave. On en trouve diverses variantes, ainsi que je le mentionne dans mon ouvrage, "Conter pour les Petits - La Trame".

  La brousse est le nom donné à un fromage blanc de Provence fait avec du lait de chèvre ou de brebis.

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